Il y a des budgets qui rassurent. Et puis il y a ceux qui inquiètent.
Celui que la Fédération Wallonie-Bruxelles vient de présenter appartient clairement à la seconde catégorie.
Oui, la situation budgétaire de la FWB est critique. Mais face à l’incendie, le gouvernement MR–Engagés n’apporte pas d’eau : il jette de l’huile sur le feu.
🔹 Un budget de comptable, pas de politique
Ce budget n’est pas le fruit d’une vision. C’est un tableau Excel déguisé en projet de société.
On nous parle de “responsabilité”, mais ce qui domine, c’est la peur, le flou, et une communication anxiogène.
On prépare l’opinion, à coup de rapports d’experts et de menaces budgétaires, à accepter des coupes qui n’ont rien de neutre.
Sur 700 millions d’euros d’économies annoncées d’ici 2029, seules 250 millions sont identifiées.
Le reste ? Des incertitudes, des “pour l’instant”, des zones d’ombre.
Les francophones méritent mieux qu’un budget en mode cache-cache.
💶 Un saut d’index qui frappe aveuglément
Le gouvernement appelle cela une “stabilisation”.
En réalité, il s’agit d’un saut d’index généralisé sur les dotations et subventions.
Une mesure brutale, injuste, et surtout, aveugle.
Les écoles, les crèches, les maisons de jeunes, les centres culturels, tous verront leur financement amputé de l’indexation automatique.
Et comme souvent, ce sont les communes et les familles qui paieront la facture.
Quand les dotations ne suivent plus l’index, les salaires augmentent mais les subventions stagnent.
Résultat : les communes devront compenser, ou augmenter les taxes locales.
Le pouvoir régional fait des économies, et le pouvoir local paie la note.
📚 La fin de la gratuité scolaire : un recul social inacceptable
Supprimer la gratuité scolaire, c’est supprimer une mesure d’égalité concrète.
Cette décision est à la fois cynique et hypocrite.
On prétend “réduire la charge administrative des directions”, alors qu’on va les plonger dans un véritable cauchemar administratif : vérifier les revenus des parents, sélectionner les bénéficiaires, gérer des aides variables…
Résultat : on recrée des inégalités entre élèves, on fragilise le pouvoir d’achat des familles, et on complique la vie des écoles.
C’est un retour en arrière social que rien ne justifie.
👩🏫 Des enseignants fatigués qu’on punit au lieu de soutenir
Les enseignants sont déjà au bout du rouleau.
Plutôt que de les soutenir, on leur impose une charge horaire accrue : 22 périodes hebdomadaires au lieu de 20.
Sous couvert “d’égalité”, on crée une inégalité supplémentaire.
Cette réforme est ingérable sur le terrain.
Un enseignant de mathématiques qui a déjà cinq classes devra-t-il en prendre six ?
Ou accepter d’être payé 20/22e faute d’un horaire complet ?
C’est une absurdité pédagogique et humaine.
🎓 L’enseignement supérieur sous pression
Oui, il fallait sortir du gel du minerval.
Mais pas avec une hausse brutale de 43 % sans lisser l’effort et sans définir clairement les nouveaux seuils du statut d’étudiant de condition modeste.
Sans cette transparence, difficile de parler de “justice sociale”.
Cette réforme touchera d’abord la classe moyenne, qui verra ses enfants payer le prix fort de la rigueur budgétaire.
👶 Petite enfance, jeunesse et recherche : les grands sacrifiés
Non-indexation des subventions aux crèches, moratoire sur les organisations de jeunesse, coupes dans la recherche scientifique :
le message du gouvernement est clair — les jeunes et les cerveaux peuvent attendre.
Dans un pays qui se veut moderne et ouvert, c’est un signal catastrophique.
La recherche n’est pas une dépense : c’est un investissement.
Sacrifier nos chercheurs, c’est sacrifier notre avenir.
🏛 Et le gouvernement ? Zéro effort sur lui-même.
Pendant que tous les secteurs doivent “faire leur part”, le gouvernement ne s’applique aucune mesure d’économie.
Pas un mot sur les indemnités logement, les frais de cabinet, ou la taille des équipes ministérielles.
L’austérité, c’est toujours pour les autres.
🔚 Conclusion : le renoncement n’est pas une politique
Ce conclave budgétaire n’est pas un exercice de vérité, mais de renoncement.
Le MR reprend d’une main communautaire ce qu’il promet peut-être de donner d’une main fédérale.
Hier, les Engagés détruisaient le tronc commun.
Aujourd’hui, ils détruisent la gratuité scolaire.
Demain, à ce rythme, ils détruiront l’idéal même d’égalité des chances.
“La rigueur ne peut pas être synonyme d’injustice.
La responsabilité, c’est d’investir dans la jeunesse, dans l’enseignement et dans la culture — pas de les sacrifier sur l’autel de l’austérité.”